Découvreurs méconnus
Quand
on parle, dans le domaine médical, d’inventeurs méconnus, le nom de Semmelweis
vient d’emblée à l’esprit tant a frappé les esprits l’histoire pathétique de ce
médecin hongrois (1818-1865), découvreur de l’importance de l’hygiène, très
longtemps avant Louis Pasteur, et rendu fou par l’acharnement haineux dont il
fut l’objet par ses « confrères ».
Puis viennent des noms historiquement plus
récents, peu ou mal connus.
Nombreux
sont les médecins qui ont en mémoire le nom du docteur Balint (1896-1970) qui a
classé certaines maladies comme psychosomatiques (1) ; mais qui connait le
docteur Georg Groddeck (1866-1934) ? Groddeck,
bien avant Balint, s’était rendu compte que toute maladie comportait un versant
psychique et avait traduit, non sans succès, cette conception nouvelle dans sa
pratique. Mais Groddeck ne fit pas école, contrairement à Sigmund Freud qui,
lui, refusa constamment toute application de la psychanalyse hors du domaine
des maladies mentales. Groddeck (2) ne ramenait pas tout à la psychanalyse mais
il pratiquait une médecine pleine d’avenir, celle de l’homme complet, ce que
pressentent bien des généralistes, mais qui reste ignoré de la plupart des
Professeurs de Médecine.
En cancérologie, depuis quelques décennies,
les chimiothérapies sont planifiées
dans leur rythme et leurs doses. Auparavant les doses massives
prescrites sur un petit laps de temps avaient beaucoup plus d’inconvénients que
de résultats favorables. Mais bien peu de cancérologues savent que la nouvelle
façon de faire fut inspirée des travaux du docteur André Gernez (1923-2014),
menés dans les années 1960, contrebattus en France mais écoutés aux U.S.A. d’où
elle nous revint. Gernez, radiothérapeute de formation fut aussi un biologiste
inventeur d’une prévention générale du cancer (3), des allergies et de la myopathie de Duchesne, mais la plupart
de ces travaux restent encore ignorés.
Qui n’a pas entendu parler de l’hypnose, de ses applications médicales ou de l’intérêt
des pensées positives ou du bienfait de la bonne humeur sur la santé ?
Mais quand, en France, quelqu’un parle de « la méthode Coué » (4),
c’est, la plupart du temps, pour s’en moquer. Émile Coué, petit pharmacien lorrain qui vécut de 1852 à 1925, est pourtant reconnu, hors de
nos frontières, comme un pionnier de l’autosuggestion, dont les applications
sont universelles.
Ces trois là mériteraient bien une place
dans les études médicales ; on en est encore très loin en France plus
particulièrement. Les praticiens qui ont tenté de développer les idées de ces
découvreurs ont le plus souvent été traités de charlatans ; les Facultés
de médecine, l’Académie de Médecine et l’Ordre des médecins restent sourds et
aveugles. Le pauvre Coué est le plus malmené car son nom n’est prononcé que
pour railler une méthode dont les moqueurs n’a rien compris : ainsi, quand
un homme politique déclare « voir le bout du tunnel » de la crise,
des journalistes l’accusent de pratiquer la méthode Coué ! Or celle-ci n’a
rien à voir avec ce genre de prédictions volontaristes, la méthode Coué est une pratique d’auto hypnose qui n’a
d’action possible que sur l’organisme de celui qui l’emploie. Si je veux faire
prendre à mes électeurs mes désirs pour des réalités, il s’agit de propagande,
pas de méthode Coué !
A ces trois là, il faut, en toute justice,
ajouter beaucoup d’autres noms de grands méconnus dont nous ne ferons ici
qu’évoquer quelques uns…en ordre alphabétique car nous ne sommes pas juges de
leur importance respective :
Anne Ancelin-Schützenberger (née en 1918)
(5) repéra si bien comment des maladies
peuvent se transmettre de génération en génération sans qu’aucun facteur
génétique n’entre en jeu.
René Dubos (1901-1982) (6) né dans
l’Oise passa la plus grande partie de sa
vie aux U.S.A. où il put développer ses idées sur l’écologie humaine, travaux
qui restent le plus souvent encore totalement inconnus des médecins aussi bien
que des écologistes.
Élisabeth Kübler-Ross (1926-2004), née en
Suisse et décédée aux U.S.A. apprit à accompagner les patients en fin de vie
(7), un modèle encore si peu suivi dans nos hôpitaux.
Catherine Kousmine, médecin suisse
francophone (1904-1992), repéra bien avant d’autres l’influence de
l’alimentation dans la genèse des maladies les plus courantes dans nos pays
dits développés (8), revalorisant le vieux concept
hippocratique : « que l’aliment soit ton remède ».
Henri Laborit (1914-1995) , outre de
nombreuses publications scientifiques, publia plusieurs livres destinés au
grand public et patronna un film montrant l’importance des effets du stress
chronique sur la santé et l’effet souvent décisif de l’inhibition de l’action
qui prive l’organisme des réponses salvatrices (9). Il fut très vite mis à
l’écart et privé se subsides. Ses travaux sont encore recouverts d’une chape de
plomb de la part des grandes institutions médicales.
Michel Odent (né en 1930) appliqua en France,
dés les années 1970, avec Frédéric Leboyer, une méthode d’accouchement naturel puis
dut s’exiler en Angleterre (10).
Henri
Picard (1936-2003), dés 1983 (11), sut
montrer que l’arthrose est une maladie et non un vieillissement et que, de
plus, c’est une maladie guérissable, ce qui, en 2016, fut confirmé avec les
premiers résultats d’un médicament qui copie les recommandations de ce pionnier
totalement oublié..
Jean
Seignalet (1936-2003) fut en France, à notre connaissance, le premier à
expliciter l’importance de la flore intestinale (dénommée aujourd’hui
« microbiote ») et en déduisit une alimentation qui peut soigner un
grand nombre de maladies liées à l’état de cette flore (12).
Carl Simonton (1942-2009) et sa femme Stéphanie ont illustré les possibilités de
guérir des cancers improbables (13). Un temps poursuivis dans leur pays, les
U.S.A., ils finirent par être rayés de la liste des médecines douteuses, et les
éléments de leur méthode pénètrent peu à peu les pratiques des centres
anticancéreux.
Pierre
Tubery (1929-2017) ramena d’Afrique des plantes dont il avait eu la patience
d’apprendre l’utilité auprès d’un guérisseur dont il s’était fait un ami. Le
desmodium est maintenant commercialisé et reste le premier médicament capable
de régénérer le foie mais d’autres plantes,
utilisables dans des maladies orphelines, attendent encore qu’un laboratoire
accepte de les étudier.
Toutes ces personnes ont en commun d’être
désintéressées, et d’avoir fait des découvertes qui finissent par s’imposer et
par être reprises sous une forme ou sous une autre.
Il faudrait, en toute justice, ajouter à
cette liste les personnes atteintes de maladies que la
Médecine peine à soigner :
après avoir cherché par elles-mêmes hors des sentiers battus, elles ont
témoigné de leur guérison. L’une des premières à le faire fut Rika Zaraï, que
l’esprit français, volontiers taquin, ridiculisa, à tort à notre avis.
Dans le cas des découvreurs de médicaments, la
reconnaissance de leur validité est plus
difficile, elle nécessiterait de passer par de longues et coûteuses
expérimentations hors de portées d’un chercheur solitaire. Il est malheureux
que la recherche en ce domaine ait été abandonnée à l’industrie pharmaceutique
qui n’entreprend ces études que lorsqu’elle est assurée d’avoir un retour sur
investissement. C’est ainsi que seule une plante parmi celles que Pierre Tubéry
avait ramené est passée dans le domaine commun. La question se complique
lorsque le découvreur a commercialisé lui-même le produit nouveau : ce fut
le cas de Jean Solomidés et de Mirko Belganski dont les découvertes furent
rapidement mises sur le marché, les exposant ainsi à l’accusation d’exercice
illégal de la pharmacie.
Fin
Bibliographie succincte :
un seul ouvrage par auteur
1 / La maladie, le médecin et son
malade, éd Payot
2
/ La maladie, l’art et le symbole, éd Gallimard
3
/ Pour une politique publique de prévention active du cancer – Drs J.C. Mériot
et J.Lacaze éd « la nouvelle renaissance » -2012
4
/ A son sujet lire : « Tous les jours de mieux en
mieux… »de R. Centassi et G. Grellet éd. Robert Laffont
5
/ Aïe mes aïeux, éd Desclée de Brouwer
6
/ L’homme et l’adaptation au milieu, éd Payot
7
/ Vivre avec la mort et les mourants, éd Le Rocher
8
/ Soyez bien dans votre assiette, éd Sand
9
/ L’éloge de la fuite, éd Robert Laffont
10
/ Bien naître, éd du Seuil
11
/ Vaincre l’arthrose, éd Le Rocher
12
/ L’alimentation, la troisième médecine, éd De Guibert
13 /
Guérir envers et contre tout, éd de l’Épi