L’ARTHROSE EST UNE MALADIE
L’arthrose
n’est pas un vieillissement des articulations, c’est une maladie.
Cette maladie fut longtemps négligée par la
recherche médicale, un peu comme les maladies orphelines, bien que,
contrairement à ces dernières, elle soit très répandue, du moins dans nos
contrées. Mais elle avait aussi en commun avec ces maladies
d’embarrasser des médecins, fort démunis. Ceux-ci, dés lors qu’ils avaient fait
leurs études après 1960, n’avaient même plus été instruits de ce qui, dans les
siècles précédents, avait permis de
soulager les sujets arthrosiques assez aisés pour bénéficier des cures
thermales, connues depuis l’empire romain et remises à l’ordre du jour au XIX°
siècle.
L’arthrose fait partie des rhumatismes
chroniques, elle est très fréquente dans les pays vivant « à
l’occidentale ». On la définit actuellement comme une altération des
cartilages et des os qui s’installe tranquillement, le plus souvent sans se
manifester avant des dizaines d’années d’évolution sans douleur ni déformation
apparente. Il en va de l’arthrose comme de l’artériosclérose, un dépistage
systématique effectué sur des jeunes soldats américains a démontré l’existence
de débuts de lésions chez des sujets qui étaient indemnes de tout trouble.
Le
cartilage articulaire est le premier touché, il s’amincit, ce qui se traduit,
sur les radios, par un pincement de l’espace interosseux. Des lésions osseuses
apparaissent ensuite, avec un
épaississement et un élargissement des extrémités des os donnant parfois les
fameux becs de perroquets qui font si peur à leur propriétaire et qui pourtant
ne sont pas à l’origine des douleurs, celles-ci relevant davantage d’autres
facteurs. Les radiologues connaissent bien les signes de l’arthrose, mais, paradoxalement,
les lésions peuvent être très avancées sans que le sujet ressente quoique ce
soit tandis que d’autres sujets, présentant de discrets signes radiologiques
peuvent souffrir beaucoup.
La douleur caractérise si bien l’arthrose
qu’en Picardie, « avoir des douleurs » est synonyme
d’ « avoir de l’arthrose ». La douleur arthrosique survient au
démarrage et s’atténue ou même disparaît après le « dérouillage »
matinal, quitte à se manifester de nouveau quand le sujet se relève d’une
chaise où il est resté assis un moment. La fatigue, un effort ou un faux
mouvement vont réveiller la douleur.
Bien que l’arthrose ne soit pas classée
dans les maladies inflammatoires, il est probable que la douleur manifeste la
survenue d’une inflammation locale.
D’OÙ
VIENT L’ARTHROSE ?
En l’absence de connaissances sur les causes
de cette affection, la Médecine est réduite à énumérer des facteurs de risque.
L’âge
est-il un facteur de risque ? En
réalité, il en est de l’arthrose comme de toutes les maladies qui demandent un
long délai pour s’installer et enfin se manifester : artériosclérose, cancers, sont, pour cette raison, également plus nombreux chez les sujets âgés.
Une
prédisposition génétique est volontiers évoquée devant l’observation de cas familiaux, mais,
contrairement à ce qui existe pour les rhumatismes inflammatoires, aucun gène,
aucun type tissulaire (H.L.A.) particulier n’a été mis en évidence dans l’arthrose. Il peut s’agir d’une simple transmission
intergénérationnelle, soit par la poursuite d’un même mode de vie, soit par un
mécanisme épigénétique qui reste à découvrir.
Une
anomalie articulaire ou osseuse est un point d’appel pour une arthrose, c’est
le cas en particulier pour les scolioses. Des traumatismes articulaires, fractures,
luxations, entorses récidivantes, peuvent être à l’origine d’une arthrose. Les
microtraumatismes répétés, vibrations en charge, mouvements répétitifs et surmenages dus à des charges trop lourdes
expliquent les arthroses des carreleurs, des travailleurs maniant des marteaux
piqueurs, des manutentionnaires, et, de façon générale, de toute personne qui
ont beaucoup travaillé physiquement L’exposition prolongée à un froid humide ou
à d’excessives variations de température expose aussi à l’arthrose, sans doute
par le déficit circulatoire que cela entraine.
Un
excès de poids agit de façon
mécanique en infligeant aux articulations des genoux, des hanches et du dos une
pression anormalement élevée sur les cartilages articulaires. De plus les
tissus graisseux produisent des cytokines pro-inflammatoires ainsi que de la
leptine, une substance nocive pour les cartilages.
Ni le surentrainement ni les efforts violents
répétés ne sont bons pour les articulations. Mais l’absence d’exercice physique et la position assise prolongée sur
une chaise ou au volant sont tout autant néfastes, aussi bien pour les
cartilages que pour les os. Les articulations, comme les muscles, s’usent quand
on ne s’en sert pas ! L’immobilité s’accompagne souvent de contractions musculaires
prolongées: ces contractures restreignent les circulations sanguines et
lymphatiques régionales et donc aussi bien les apports nutritionnels que
l’évacuation des déchets. Les vertèbres cervicales sont souvent les premières
atteintes, et cela a été rapporté à la fréquence des contractures observées au
niveau du cou et des épaules.
Les
contractures reflètent souvent un stress
chronique, mais le stress joue aussi son rôle dans le déclenchement des douleurs.
Le
rôle de l’alimentation fut longtemps
minimisé, restreint aux arthroses secondaires à une hyper uricémie, responsable
de la goutte. En 1983, le docteur Picard
(2) évoquait la responsabilité d’une agriculture et d’un élevage très
utilisateurs de substances chimiques bloquant les oligoéléments et favorables
aux phénomènes inflammatoires.
C’est à cette époque que les premières
recherches sur le statut des français en vitamines et oligoéléments objectivent
la fréquence des déficits alors même que ces sujets apparaissent indemnes des
maladies de carence traditionnellement décrites. On s’aperçoit aussi de la
nécessité d’un apport équilibré entre les différents oligoéléments : un
excès de fer inhibe l’utilisation du cuivre et du zinc et favorise
l’inflammation. Or, un excès d’apport de fer est fréquent dans une population
friande de viandes rouges naturellement riches en cet élément. Ainsi l’alimentation des pays industriellement
développés, trop riche en viande, carencée en oligoéléments et trop riche en
omégas 6 pro-inflammatoires, peut favoriser de façon importante l’apparition de
l’arthrose. Les travaux du Professeur Seignalet (1) allaient expliciter et confirmer l’importance de l’alimentation aussi
bien dans la genèse des rhumatismes que dans celle des « maladies du
siècle ». L’actuelle pollution chimique de l’environnement n’arrange pas
les affaires en nous exposant à de multiples radicaux libres qui neutralisent
les éléments utiles et favorisent l’inflammation.
L’ARTHROSE
EST UNE MALADIE ÉVITABLE. Théoriquement, une fois connus les facteurs qui lui
donnent naissance, nous pouvons tenter de l’éviter. Mais que peut dire
aujourd’hui un médecin du travail à un ouvrier du bâtiment, à un employé d’une
entreprise de travaux publics, à un agent de nettoiement dont les articulations
commencent à montrer des signes de surcharge ? Et que peut envisager un
artisan charpentier ou carreleur ? Dans la pratique, aujourd’hui, le
dépistage et les réorientations professionnelles nécessaires manquent le plus
souvent...
Reste
à savoir quoi faire quand l’arthrose est là, on essaiera d’en parler bientôt,
si vous le voulez bien…
fin
Bibliographie
1/ L’alimentation la troisième médecine – Jean
Seignalet – éd De Guibert - 1995
2/ Vaincre l’arthrose – Henry Picard -1983 –
réédité en 2006