Santé pour
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Automne
2020
RANDOMISER
OU MOURIR ?
UNE MÉTHODE
STATISTIQUE
L’épidémiologie se base sur la randomisation(1), devenue incontournable
dans la recherche médicale académique. La randomisation consiste en l’étude
simultanée et prolongée de deux groupes de sujets : un groupe témoin et un
groupe testé, c’est-à-dire soumis à l’élément
à étudier. La différence est dite « significative » quand le statisticien
peut déclarer qu’elle n’est pas due au hasard avec 95% de probabilité, et
« très significative » quand le degré de probabilité s’élève à 99%. Pouvoir
conclure nécessite parfois de suivre des milliers de sujets pendant de longues
années.
Les groupes
doivent être « appariés », composés de telle façon qu’en dehors du
facteur testé, les facteurs connus comme étant susceptibles d’interférer soient
éliminés ou représentés dans les mêmes proportions dans les deux groupes. Cet
appariement est aisé tant qu’il s’agit de neutraliser les effets de l’âge, du
sexe, du tabagisme ; concernant ceux de l’emploi, de la consommation
d’alcool, de l’exercice physique, cela s’avère déjà plus difficile ; quant
à l’alimentation, il devient encore plus aléatoire d’en juger car on doit
s’appuyer sur les déclarations des sujets étudiés. Or, si un seul facteur
important n’est pas correctement pris en compte, l’étude est biaisée. C’est
pourquoi souvent la conclusion d’une étude se termine par la mise en garde
suivante : « ces résultats doivent être confirmés par des études
complémentaires.»
La détection
des biais n’est pas toujours aisée, elle nécessite de disposer de la totalité
des données, ce qui est, dans la plupart des cas, rendu impossible quand
l’étude a été financée par une entreprise privée qui a aussi le privilège de ne
pas publier les résultats quand ils ne lui plaisent pas..
Mais certains
biais sont faciles à détecter : ainsi
la plupart des études concernant les maladies
cardiovasculaires ou les cancers ne
tiennent compte des facteurs
psychologiques, ni des facteurs sociaux, ni des facteurs environnementaux, jamais pris en compte dans
leur totalité, car cela rendrait le coût de l’étude prohibitif. Ces biais
majeurs ôtent toute valeur scientifique
à bien des études épidémiologiques.
Il est déjà difficile
d’avoir des certitudes en biologie humaine : les fourchettes de
« valeurs normales », souvent fort étendues, attribuées aux résultats
des examens biologiques, en témoignent.
Quiconque
prend soin de son prochain, qu’il soit médecin, infirmier(ère), aide-soignant(e)
ou secouriste doit s’inspirer des règles techniques qu’on lui a appris mais il
doit, quand les circonstances le nécessitent, savoir aussi innover. N’est-ce
pas, d’ailleurs, cette capacité à l’innovation qui fait les bons techniciens,
quelle que soit la technique en question. Mais, dans le domaine de la santé,
cela est encore davantage nécessaire
car ici
la technique s’adresse, non à une chose,
mais à un être humain toujours unique en son genre et l’efficacité du
soin dépend étroitement de la qualité de la relation qui s’instaure entre le
soignant et le soigné. L’importance de cette relation explique l’existence des
effets placebo et nocebo, ainsi que par les observations de guérisons
« inexplicables dans l’état actuel des connaissances ».
En médecine,
les règles générales doivent être appliquées avec discernement en tenant compte
de la personne et de son environnement. C’est pourquoi la médecine est
davantage un art qu’une science.
Peut-on avancer dans la connaissance sans
randomiser? Évidement oui. L’histoire des médecines, y compris celle de la médecine
occidentale, montre que quantités de connaissances ont été accumulées, au cours
des millénaires, sans avoir eu recours à des méthodes statistiques qui n’existaient pas. Les chercheurs du temps passé recouraient
à l’observation de cas, adjointe à ce qu’ils pouvaient connaître de la
constitution et du fonctionnement de l’être humain.
C’est encore
cet accord entre l’observation et la biologie humaine qui a permis, dans les
derniers siècles, les découvertes de chercheurs comme Hanneman, Semmelweis,
Koch, Coley, Claude Bernard, Louis Pasteur, Fleming, Solomidés, Kousmine,
Gernez, Laborit, Beljanski, Benveniste, Montagnier, Seignalet et j’en passe.
Dans cette liste beaucoup de rejetés mais aussi des gens reconnus et honorés
par « Les Autorités Médicales et Scientifiques»…
A côté de
toutes ces avancées, la géniale étude du docteur James Lind effectuée en 1747
et concernant l’efficacité du citron dans la prévention du scorbut est
resté longtemps l’unique étude à être randomisée. C’est seulement vers 1950 que la randomisation s’impose comme
méthode privilégiée de l’épidémiologie : mettre des mathématiques dans un
nouveau domaine, la biologie, et en chasser toute philosophie avait de quoi
enthousiasmer les chercheurs aussi bien qu’une industrie du médicament de plus
en plus puissante capable de financer des études de plus en plus coûteuses.
En 1955, les
premières études concernant la responsabilité du tabagisme dans le cancer du
poumon ont certes aidé considérablement les pneumologues à promouvoir la lutte
antitabac, la « preuve » mathématiquement étayée fit vite oublier
qu’il y avait longtemps que les médecins de terrain avaient classé les cancers
des bronches parmi les « cancers des fumeurs » !
Depuis, la
randomisation a certes permis la mise sur le marché des nouveaux
médicaments mis au point par les grands labos pharmaceutiques ; il
suffisait de produire les résultats de quelques études financées par le
producteur. Ce fut l’âge d’or de cette industrie, aujourd’hui sur la défensive,
surtout depuis quelques scandales bien connus.
Dans le
domaine de la prévention, dès 1950, a été généralisée la notion que les maladies cardiovasculaires étaient dues
aux graisses, conviction basée sur deux études randomisées détournées sous la
pression du lobby sucrier. Cette erreur totale a été reconnue depuis 2015 mais
peine à pénétrer la pratique médicale toujours influencée par une publicité
prolongée.
Il est
curieux de constater que les mêmes brandissent la randomisation pour massacrer
l’homéopathie et la phytothérapie (médecine par les plantes) alors qu’ils omettent
d’en tenir compte quand des études
randomisées mettent en valeur autre
chose que des médicaments(2) ou quand elles mettent en cause l’utilité du vaccin
contre la grippe ou des médicaments « anticholestérol ».
Au total, la
randomisation reste une méthode de recherche intéressante, mais de valeur limitée,
ni généralisable ni absolue.
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1/ du mot random qui, en anglais, signifie « au
hasard »
2/ comme, par exemple,
l’intérêt de l’ail
contre l’hypertension, ou l’influence de facteurs psychologiques dans la genèse
des cancers.