ALCOOLISATION ET TABAGISME SONT ÉTROITEMENT LIÉS
LES BOISSONS ALCOOLISÉES sont consommées en France depuis fort longtemps Certes
on observait déjà ivresse et ivrognerie ; mais ces phénomènes étaient ponctuels
ce qui n’est plus le cas depuis 150 ans. C’est en effet seulement depuis 1850
environ que s’est développé et installé dans notre pays un ALCOOLISME chronique massif.(5) Les ligues antialcooliques, apparues en
France à la fin du XIXe siècle, vont d’emblée stigmatiser le buveur
excessif; elles ont abouti à l'interdiction
de l'absinthe en 1915 et aux réglementations restrictives du nombre de débits
de boisson. On peut douter de leur efficacité.
Le travail des Centres d'Hygiène Alimentaire, créés après la seconde guerre
mondiale, outre un certain nombre de guérisons individuelles, a eu le grand
mérite de considérer enfin l'alcoolique comme un malade souffrant d'une
addiction. Après la seconde guerre mondiale, l’alcoolisme touchait très
principalement des adultes. La consommation de boissons alcoolisées chez les
jeunes a commencé à croitre dans les années 70.
Le fond du problème a été développé (4) : les principales causes de
l’alcoolisme sont sociales : « chaque fois qu’une société …promeut
l’individualisme et la compétition, la tentation est grande d’aller chercher
une nouvelle sociabilité dans la boisson »(6). Le premier devoir de l'Etat aurait été de
promouvoir les recherches scientifiques nécessaires incluant les facteurs
psychologiques et sociaux ; celles-ci sont encore rares et principalement
étrangères. Il pourrait alors être
question d'actions de fond.
Si l'on s'en tient à ce qui est déjà connu, il serait prioritaire de lutter
efficacement contre l'exclusion sociale. Comme toute toxicomanie, l'alcoolisme
guette celui dont la vie en société devient trop difficile, quand on n'a plus
sa place et que s'installe le sentiment d'un rejet irrémédiable, souvent
associé à l'indifférence, quand ce n'est pas au mépris.
L'exclusion elle-même est la conséquence obligée de l'organisation sociale
et économique actuelle, elle ne saurait reculer à coup de mesurettes ponctuelles ni de
législation répressive.
Une CONSOMMATION ABUSIVE sans dépendance
est une situation fréquente en France.Il ne s'agit pas de toxicomanie, même si cela peut y mener, mais de simples
habitudes néanmoins délétères pour la santé. Les consommateurs abusifs demeurent
longtemps sensibles au discours hygiéniste, encore faut-il qu'il soit diffusé
de façon intelligente, partout et tout le temps. Là, des mesures fiscales
adaptées et une suppression de toute publicité peuvent être efficaces. Une
taxation basée sur le degré d'alcool faciliterait la consommation des bières
les moins alcoolisées. Les «bières de table» fabriquées localement titraient un
ou deux degrés d'alcool ; elles étaient les seules à être couramment
consommées en France il y a 70 ans. Elles ont rapidement disparu au profit des
grandes brasseries industrielles dont les bières plus fortes en alcool, moins
périssables, pouvaient être commercialisées partout à travers le monde.
Une taxation au degré d'alcool rendrait
moins accessibles les bières fortes, mais aussi les alcools et spiritueux, et
bénéficierait aux vins à faible degré. Ceux-ci
peuvent être fort bons, ceux 'qui ont eu la chance d'en
gouter auprès de paysans qui en produisaient encore pour leur propre
consommation, peuvent en témoigner-
Mais, en France, au début du XXe siècle, sous la pression des grands négociants, fut interdite la commercialisation des vins de moins de 10 degrés.
Mais, en France, au début du XXe siècle, sous la pression des grands négociants, fut interdite la commercialisation des vins de moins de 10 degrés.
AUTRES TOXICOMANIES –
Toutes les substances addictives créent
d'importants problèmes de santé. La consommation des drogues a repris une grande ampleur, en France, depuis
les années 70 alors qu'elles étaient devenues rarissimes depuis 1940. Aux
drogues historiques d’origine végétale se sont vite ajoutées de nouvelles
drogues synthétiques et une consommation croissante de benzodiazépines
légalement prescrites mais également addictives. ,
Ce simple rappel historique suggère une relation avec l'état de la société:
les années 70 sont une période charnière dans l'instauration progressive d’un
nouveau libéralisme économique de plus en plus absolu avec un recul des mesures sociales mises en
place en 1945.
Très tôt le Professeur Olivenstein
avait attiré l'attention sur le fait que l'addiction à une drogue est le résultat d'une conjonction entre une fragilisation de l'individu,
une disponibilité des drogues mais surtout un désordre social laissant toute la place aux
quelques « gagneurs » dominants et excluant de
plus en plus les « perdants
», « loseurs » et autres « nuls ». Olivenstein n'a pas été
entendu, il ne pouvait pas l'être puisqu'à l'époque les pays« développés » glissaient dans une dérive antisociale: l'individu seul
comptait et, selon le mot de Madame Thatcher : "la société n'existait plus" .
Les pouvoirs publics ont privilégié la répression, remplissant les prisons
de petits dealers- consommateurs, glorifiant la moindre saisie de cannabis, sans
jamais réussir à faire reculer ce qu'on qualifiait de fléau tout en développant le système qui le nourrit.
Une personne isolée, sans avenir,
surmenée ou sans travail ou encore cantonnée à un travail dénué de sens est une
proie facile de tout ce qui se présente
à elle comme susceptible d’adoucir la vie ou d’en oublier l’amertume.
Terroriser et culpabiliser les fumeurs et les buralistes, réprimer l’ivresse
publique et l’alcool au volant, pénaliser ou dépénaliser les drogues illicites
ne peut faire reculer les addictions. Au mieux, on renvoie le sujet d’une
dépendance à une autre.
TABAGISME, ALCOOLISME,
COMME TOUTE TOXICOMANIE RELÈVENT MOINS
DE MESURES SPÉCIFIQUES QUE DE CHANGEMENTS PROFONDS TOUCHANT LA SOCIÉTÉ;
FIN
Bibliographie
4/ Cf. les pages 201 à 205 de « Comment perdre la Santé » L. Jaisson -éd De Guibert- 1995
5/ Voir le livre de D. Nourrisson :
«Les buveurs du XIX° siècle » -éd Albin Michel-1990
6/ Mary Douglas :
« Constructive drinking » 1987 Cambridge University Pre
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